Travail sur les archétypes Avaloniens, 3ème Partie, Excalibur

Publié le par Lyra Ulchabhán



Arthur est resté à mes côtés pendant plusieurs semaines, et vraiment sa présence a été un profond soulagement pour moi. Depuis quelques jours cependant il s'est lentement estompé, et j'avoue avoir traversé des moments difficiles depuis son départ ... Cela dit, je commence à comprendre qu'il n'est pas parti sans rien laisser derrière lui, contrairement à ce que j'ai pensé de prime abord. Ce n'est qu'avant-hier que j'ai compris quel était le prochain archétype avec lequel j'allais désormais travailler : Excalibur.

J'avoue avoir été un peu destabilisée, étant donné que je ne pensais pas la "rencontrer" aussi tôt. Mais en réalité, quand j'y repense, cela me semble de plus en plus logique ... J'ai commencé par Mordred, l'aspect sombre, pour aller vers Arthur, l'aspect lumière, avant d'enfin passer à Excalibur, l'épée emblématique des légendes arthuriennes, symbole de la souveraineté et de la légitimité d'Arthur. Gobalement, jusqu'à présent, mon cycle de réflexion est centré sur Arthur : j'ai étudié son parcours, ses faiblesses au travers de Mordred, il est donc temps à présent de me pencher sur celle qui a fait de lui le Haut Roi.

Il peut sembler étrange pour certain de considérer un objet comme un archétype, d'autant plus lorsqu'on connait les théorie de Jung sur la question. Certes, un archétype est généralement un être vivant doté d'une conscience propre, mais dans l'univers arthurien et avalonien, les objets et les lieux sont bien souvent considérés comme des personnages à part entière, il me semble donc logique d'étudier leurs aspects archétypals. Pour ceux et celles qui seraient intéressés par les cours de la Table Ronde, je me permets de donner le conseil suivant : entraînez-vous à voir la conscience au coeur des lieux et des objets de l'imaginaire arthurien, cela vous sera utile !

Excalibur, donc. L'épée qu'Arthur dû sortir du rocher afin d'accéder au trône qui lui revenait de droit. Cruelle ironie, n'est-ce pas ? Cet enfant, né d'une union adultère entre le roi légitime, Uther Pendragon, et la duchesse de Cornouailles, Ygerne, sous le voile de la magie et de l'illusion. Arraché à ses parents pour être élevé par une nourrice et un tuteur. Ignorant de ses royales origines. Comment rétablir cet enfant, cet inconnu, élevé dans la dissimulation et le mensonge, dans la légitimité de ses fonctions ? Comment le faire accepter au peuple ? Comment prouver la légitimité de son rang ? A une époque où les tests ADN n'existaient pas encore, il fallait bien trouver un solution ... Et la meilleure fut, tout simplement ... la magie.

Et quelle magie ! Une épée, plantée dans un rocher (ou une enclume, suivant les différentes traditions), porteuse d'un message aussi énigmatique que tentateur : celui qui pourra m'arracher du rocher sera digne d'être roi, souverain des Deux Bretagnes. Apparemment simpliste, ce procédé se révéla en réalité purement stratégique : suivant la volonté de Merlin, qui dans son immense sagesse savait ménager les intérêts de tous, avaient fait en sorte que seul l'héritier légitime d'Uther soit capable de retirer l'épée.

Il savait que faire accepter Arthur ne serait pas une chose facile, en toute logique : le jeune homme n'avait alors que 16 ans, une expérience des armes somme toute relative, une origine obscure ... Il fallait à Merlin une solide stratégie pour arriver à ses fins ! Excalibur se révéla un excellent compromis : l'épreuve, accessible à tous, permettait à tous les prétendants au trône d'avoir l'illusion d'une chance d'accéder à la souveraineté, tandis qu'en réalité seul l'héritier légitime en était réellement capable. On peut retrouver dans cette idée une image de la Pierre des Rois de Tara, celle qui criait dès que le roi légitime s'asseyait sur elle, mettant ainsi un terme aux luttes intestines pour récupérer le pouvoir royal.

Dans cette optique, Excalibur représente la valeur, la légitimité d'Arthur. Elle est là pour prouver le droit du sang d'Arthur, pour garantir la paix du royaume en évitant les conflits entre suzerains pour récupérer le trône, et pour mettre en lumière la descendance d'Uther. Mais le symbole ne s'arrête pas là. Excalibur suivra Arthur tout au long de sa vie, rappel éternel de son ascendance et de sa valeur morale et guerrière. Investie de pouvoirs magiques souvent mal définis, elle avait la réputation d'apporter force et vaillance à son porteur, et de ne jamais s'émousser. Même son fourreau était magique, puisqu'il préservait son porteur de certaines blessures. Mais seul Arthur et Merlin, en son temps, purent la porter. Hommes sortis du cadre purement humain par leurs mystérieuses naissances (Merlin est le fils d'une créature de l'Autre Monde et d'une mortelle, Arthur est venu au monde grâce à la magie), seuls ces deux personnages sont suffisamment à la frontière des mondes pour porter l'épée légendaire sans ternir ses pouvoirs.

Et pourtant ... Arthur ne pourra pas bénéficier de l'aura d'Excalibur pour l'éternité. Entaché par une série dramatique d'erreurs humaines (dont Mordred sera la pierre angulaire), Arthur perdit peu à peu de sa valeur mystique pour devenir de plus en plus humain. C'est pour cela que la légendaire épée ne fut pas en mesure de le sauver face à Mordred, que le fourreau ne put le guérir. Mourrant mais malgré tout lucide, Arthur confia l'arme enchantée à un ami fidèle qui resta à ses côté jusqu'à la fin (la plupart des légendes évoquent Bedevere, Bedwyr en gallois) en lui demandant d'aller la jeter au plus profond d'un lac pour que son pouvoir ne soit pas utilisé à de mauvaises fins par la faiblesse humaine. Bedevere ne put tout d'abord pas se résoudre à se débarasser de l'épée, et la cacha dans un fourrée. Lorsqu'Arthur lui demanda ce qu'il s'était passé, le chevalier lui répondit qu'il avait jeté l'épée au fond du lac. Mais c'était méconnaître les ressources cognitives d'Arthur : celui-ci, connaissant les vertus de l'épée, comprit que Bedevere mentait, et le renvoya au lac. Cette fois, le chevalier ne céda pas au pouvoir de l'épée, et jeta l'arme dans les flots. C'est alors que sous ses yeux ébahis, une main d'une blancheur lumineuse fendit la surface du lac pour attraper au vol le pommeau de l'épée, avant de l'engloutir définitivement sous le miroir liquide. Rassuré par le récit fantastique de Bedevere, Arthur pourra enfin reposer en paix, sous la bienveillance des Dames d'Avalon.

Cette ultime évocation d'Excalibur tend une nouvelle fois à prouver son rôle d'élément déterminant de la valeur : elle a prouvé le lignage d'Arthur, sa valeur au combat, avant de montrer enfin la droiture de Bedevere. Tout autour d'elle n'a été que justice et valeur.

Je crois que là est le message d'Excalibur : ne vous arrêtez pas aux apparences, cherchez la vérité, la VRAIE vérité, au plus profond des choses et des êtres, car là que réside leur vraie valeur. Comme le disait si justement le renard de Saint-Exupéry : On ne voit bien qu'avec les yeux du coeur. L'essentiel est invisible pour les yeux.

PS : La photo qui illustre cet article est celle de l'une de mes propres épées, réplique d'Excalibur selon le film de Boorman.
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L
<br /> Oui, moi aussi je râle au moindre anachronisme, mais tout est si beau dans ce film! Par contre, dans cette daube de Vercingétorix, j'ai rien laissé passé car tout était à jeter... -_-<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Ne m'en parle pas ! Il y a des films comme ça, totalement décalés, qui gâchent toute l'histoire ! Comme le Roi Arthur, avec Keira Knightley en maillot de bain dans la neige, j'ai eu du mal lol<br /> <br /> <br />
L
<br /> Ah! Excalibur de Boorman... sans conteste l'un de mes films préférés entre tous. J'aime beaucoup l'idée essentielle de se film qui fait d'Excalibur le lien entre la terre et le roi.<br /> Quand je regarde le film, je suis toujours aussi touchée et troublée par la déclaration de Lancelot: "Un roi sans terre, une terre sans roi".<br /> Comme toi, je pense que les archétypes peuvent être des "objets" puisque ceux-ci ont une âme, une conscience et une histoire propre. :)<br /> <br /> <br />
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L
<br /> J'ai adoré ce film moi aussi, malgré les nombreux anachronismes un peu partout (vi, l'armure XVème, au VIème siècle ça me pique les yeux, je suis pénible, je sais XD). Mais on pardonne, tant la<br /> qualité d'interprétation et la symbolique cachée est appréciable !<br /> Je vois que nous avons pas mal de visions communes ^^<br /> <br /> <br />